La fusion, nouvelle source de conflit entre l’Union et les Etats-Unis

Le vaste projet de réacteur expérimental de fusion nucléaire, ITER, est au centre d’une nouvelle polémique entre Washington et Bruxelles.

La décision prise récemment par Washington de privilégier le Japon pour l’implantation du futur réacteur expérimental de fusion nucléaire, ITER, a été perçue comme une gifl e par l’Union. Par la France en particulier qui, forte de sa tradition nucléaire et soutenue par ses partenaires européens, était certaine d’être le pays hôte de ce méga prototype concocté par un consortium international regroupant, outre l’Union, le Japon, la Russie, la Chine et la Corée du Sud.

Depuis, la France multiplie les interventions pour tenter de convaincre les autres pays de l’Union mais aussi certains membres du consortium, la Corée du Sud en particulier, de soutenir son site nucléaire de Cadarache. Quitte à ce que les Etats membres grignotent sur leur budget national pour soutenir un programme jusqu’à présent uniquement fi nancé par des fonds communautaires. C’est que la fusion thermonucléaire inscrite dans le programme-cadre de recherche de la Commission représente un fameux pactole (près de 700 millions d’euros lui ont été alloués sous l’actuel programme), de quoi assurer les activités du secteur nucléaire dont le volet “fi ssion” est en perte de vitesse vertigineuse depuis la fermeture programmée des centrales électro-nucléaires en Europe. Un pactole à ne pas négliger pour la France, de loin le pays le plus nucléarisé d’Europe.

Blast from the past
This article first appeared in January 2004 issue of leuropeennedebruxelles.com.

La décision prise par Washington de soutenir le site japonais n’est pas anodine. Les Etats-Unis, qui ont réussi dans les années 50 – et au grand dam des Français – à impo-ser leur technologie de la fission nucléaire avec leurs réacteurs Westinghouse, ne sont pas prêts à conférer aux Européens le leadership dans ce qui est considéré comme la “seconde vague” du nucléaire, à savoir la technique de fusion thermonucléaire. Mais les Etats-Unis jouent la prudence. Présents dans le programme ITER, ils n’entendent pas pour autant s’y investir trop. En 1998, ils décidaient même de se retirer pour décider infine de réintégrer la structure en 2002. Avec une contribution minimum, histoire de leur permettre de bénéfi cier des retombées technologiques du projet.

L’Union, de son côté, n’a jamais cessé de soutenir un projet dont les premières études ont été lancées dès la création du traité Euratom. Fort de son expérience, elle semblerait à présent être tentée de jouer cavalier seul. Du moins de tenir la dragée haute aux EtatsUnis qui, de leur côté, semblent avoir décidé de diviser pour mieux régner.

Coup de projecteur

Parler de fusion nucléaire, c’est parler au superlatif. Question budget d’abord. Le seul programme expérimental ITER devrait engloutir plus de 10 milliards d’euros (moitié pour la construction du prototype, moitié pour sa mise en exploitation), sans garantie de résultats. La technologie de la fusion, si elle semble relativement maîtrisée, est encore loin de donner des résultats industriels. Basée sur la fusion d’atomes légers (à l’inverse de la fi ssion largement répandue qui utilise la capacité d’atomes lourds comme l’uranium de se fi ssionner en dégageant de l’énergie), elle n’a jusqu’à présent réussi à produire de la chaleur que pendant une fraction
infi me de temps.

De la chaleur “contrôlée” du moins puisque le principe a été pour la première fois testé lors des bombardements de Nagasaki. Les chercheurs n’en démordent pas pour autant et promettent que d’ici 40 à 50 ans, la fusion thermonucléaire pourrait être une source illimitée et sans danger d’énergie.

Marie-Martine Buckens


The author: Michel DEURINCK

Michel Deurinck, born in Brussels in 1950, started his career in the Belgian civil service, dedicating over 30 years to public service. Upon retirement, he pursued his passion for journalism. Transitioning into this new field, he quickly gained recognition for his insightful reporting on politics and culture. Deurinck's balanced and thoughtful approach to journalism has made him a respected figure in Belgian media.

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