Des “Laboratoires de paix” victimes de turbulences

En juillet 2002, l’Union lance son instrument principal en matière de coopération avec la Colombie : les laboratoires de paix. Une innovation dont le nom révèle l’idée qui l’inspire : “laboratoires” parce qu’ils relèvent de la tentative exploratoire, prétendant servir à l’apprentissage des communautés locales engagées dans la pacifi cation ; de “paix” parce qu’ils visent à transformer les dynamiques structurelles qui ont engendré la violence et la pauvreté.

Dans un premier temps, 34,8 millions d’euros sont destinés aux projets qui comprennent trois axes : culture de paix et droits de l’homme, renforcement institutionnel et activités productives. Et cela dans une région stratégique du confl it armé colombien, le Magdalena Medio : une zone très riche en ressources naturelles (pétrole, charbon, or, bois, pâtures, eau…) mais à la population paradoxalement très pauvre. En plus – et ceci est très important, souligne-t-on à la Commission –, “une région où des efforts de résistance civile pacifi que avaient été préalablement entamés”.

Un an et demi après, le deuxième labo vient d’être inauguré le 21 janvier par le commissaire Chris Patten. Cette deuxième version, qui vise encore trois régions figurant parmi les plus touchées par la violence, devrait profi ter à une population de 1,4 millions d’habitants, soit deux fois plus qu’à Magdalena Medio.

L’enveloppe fi nancière s’élève, cette fois, à 33 millions d’euros. Or, même si l’initiative européenne a bénéfi cié de l’appui de la grande majorité de la population colombienne, le contexte dans lequel est né le deuxième laboratoire de la paix suscite, à l’heure actuelle, des inquiétudes.

En tant que projet, c’est une initiative positive. Mais on ne peut pas se prononcer sur les résultats obtenus puisque, pour le moment, on ne dispose pas d’une évaluation de la première année des activités.Mme Britta Madsen de l’Office international des droits humains Action Colombie (OIDHACO)

Et d’ajouter : “Il aurait été important de prendre en considération les enseignements tirés de l’expérience pilote avant de lancer de nouveaux laboratoires de paix”.

Ce qui est le plus grave, “c’est l’évolution de la situation dans laquelle les labos s’inscrivent”, souligne Mme Madsen, eu égard à l’intensification du conflit colombien. Dans une communication adressée à la Présidence irlandaise du Conseil de l’Union, plusieurs organisations européennes de défense des droits de l’homme -travaillant en étroite collaboration avec des partenaires colombiennes – fustigent le fait que “les groupes armés illégaux (rebelles et paramilitaires) ont ignoré les trois recommandations que le Haut Commissariat de l’Onu avait dictées à leur égard”, tandis que le gouvernement colombien n’aurait respecter que 7 des 24 recommandations qui lui étaient adressées. L’Onu a même fait part de sa grande préoccupation sur deux sujets. D’une part, le projet du gouvernement colombien qui octroierait des concessions pénales, contraires au droit international, aux paramilitaires démobilisés. Une modifi cation constitution nelle qui attribuerait des taches judiciaires aux forces militaires colombiennes n’est, d’autre part, pas mieux accueillie.

Pour l’OIDHACO, “l’Union doit avoir une position ferme envers le gouvernement colombien” afi n de l’inciter à respecter les traités internationaux auxquels il a souscrit, sous peine d’avoir à en subir les conséquences. “

Sinon, la position de l’Union pourrait être interprétée comme un manque de soutien à l’Onu”, estime Mme Madsen. Du coté des autorités colombiennes, on parle d’incompréhension et, même, d’attitude “néocoloniale” lorsque la Commission se prononce de façon critique sur la situation des droits de l’homme en Colombie. Les esprits, calmés grâce a la visite de M. Patten, ne manqueront sans doute pas de s’agiter à nouveau sous peu…

Blast from the past
This article first appeared in January 2004 issue of leuropeennedebruxelles.com.

Surtout si le Conseil Affaires générales revient à la charge en passant au peigne fi n la problématique des libertés fondamentales dans ce pays. Les relations entre la Colombie et l’Union pourraient entrer alors dans une zone de turbulences.

Erik Struyf


The author: Michel THEYS

Michel Theys, a Belgian native, began his career as a civil servant, serving the public for several decades. After retirement, he shifted gears to follow his passion for journalism. With a background in public administration, Theys brought a unique perspective to his reporting. His insightful articles, covering a wide array of topics, swiftly gained recognition. Today, Michel Theys is a respected journalist known for his balanced and thoughtful reporting in the Belgian media landscape.

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